#e-sante - le 21/11/2022

L’intelligence artificielle au cœur de la médecine

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L’intelligence artificielle (IA) s’installe dans de nombreux domaines et intègre petit à petit notre quotidien. La médecine n’est pas laissée-pour-compte et connaît une montée en puissance de l’IA.

Le Conseil de l’Europe, dans son rapport sur « l’impact de l’intelligence artificielle sur les relations médecin-patient », définit 3 publics cibles :

  • Les chercheurs en médecine
  • Les professionnels de santé
  • Les patients

Accélérateur pour les chercheurs, accompagnateur pour les professionnels de santé et assistant pour les patients, l’IA trouve autant d’usages qu’il y a d’actes et de pratiques.

Les champs d’action de l’intelligence artificielle

  • La recherche et le développement de médicaments

Grâce à une multitude d’algorithmes, mais également au machine learning, l’IA permet d’accélérer la recherche et de créer des molécules via, notamment, un rapprochement de données de santé. D’ailleurs, certaines ONG telles que Drugs for Neglected Diseases Initiative, spécialisée dans la recherche de médicaments sur les maladies tropicales, certaines start-ups telles que Insilico Medicine dont l’objectif est d’accélérer la recherche pharmaceutique, certains laboratoires pharmaceutiques tels que Sanofi qui développe des médicaments de précision, optimisent les phases de recherche grâce à l’IA et permettent le développement de nouvelles molécules dans des délais réduits.

  • La gestion et la planification

Des systèmes d’IA sont développés afin de faciliter les diverses tâches administratives, de planification de sortie ou encore d’actions courantes telles que la préparation de documents médicaux, la recherche et la navigation dans les registres, la réalisation d’ordonnances ou la gestion des blocs opératoires. C’est le cas de l’hôpital Odense au Danemark, qui utilise l’IA pour la programmation des salles d’opération afin d’améliorer l’efficacité opérationnelle en déclenchant l’achat du matériel périopératoire et en attribuant des tâches aux robots logistiques, mais également aux employés. La planification ainsi déléguée, les équipes médicales peuvent se consacrer pleinement à l’exercice de leurs spécialités.

  • Les soins de santé

Les programmes d’IA permettent au praticien, avec le croisement des données de santé du patient, d’établir un diagnostic hautement précis ainsi qu’une personnalisation des traitements. L’IA va accompagner le professionnel de santé dans l’analyse et l’interprétation de l’ensemble des données relatives à la santé physique ou mentale, passée, présente ou future, aux informations transmises lors de tests ou d’examens. La plateforme DESIREE, par exemple, développée par un réseau de partenaires (centres de recherche en IA, hôpitaux, laboratoires, universités…) dans le cadre d’un projet soutenu par l’Union Européenne, aide les cliniciens dans le traitement et le suivi des patientes atteintes de cancers du sein en se basant sur de grandes quantités d’informations afin de choisir le traitement adapté pour chaque cas de cancer. Elle propose trois systèmes d’aide à la décision clinique, le premier basé sur les guides de bonnes pratiques, le deuxième basé sur l’expérience acquise et de troisième basé sur la mise en œuvre d’un raisonnement à partir de cas.

  • L’accès aux soins et à l’information

De nombreux systèmes d’IA sont à destination du patient. Souvent sous forme d’applications, d’appareils connectés ou de chatbot, ils permettent le suivi des maladies chroniques comme le diabète ou l’hypertension, le suivi personnel de la santé comme l’auto prise en charge ou les recommandations comportementales basées sur des fonctions analytiques ou encore le suivi de problèmes de santé mentale. Dans le cadre de la gestion du diabète par exemple, un système a été développé afin de permettre à chaque individu de suivre son taux de glycémie via un patch connecté. Placé au niveau du bras, il mesure en continu le taux de glycémie et permet de visualiser des rapports en temps réel à chaque fois que le patch est scanné ou dans un temps donné. Il permet également, en fonction du taux de glycémie du patient, de ses habitudes (alimentaires, sportives) et de ses antécédents médicaux, de personnaliser ses objectifs et d’accompagner l’utilisateur dans la stabilisation de sa glycémie par le biais de conseils, de bonnes pratiques ou d’alertes. Ce dispositif, couplé avec une pompe à insuline, dont l’utilisation via une application a récemment été autorisée par la Food and Drug Administration, permet au patient d’adapter ses injections. L’application va corriger automatiquement l’excès de glucose en fonction des données du patient.

Comment évolue la relation médecin-patient ?

La relation médecin-patient ne cesse d’évoluer. D’un modèle dans lequel le médecin était le seul détenteur du savoir, vers des patients informés et en capacité de peser dans la relation. Entre la loi Kouchner du 4 mars 2002 qui reconnait le rôle et les droits des patients dans leurs parcours de soins et la montée en puissance d’internet, les patients participent activement à la relation thérapeutique avec leurs médecins, mais sont également plus informés et plus autonomes dans la recherche de diagnostics. Ainsi, l’information émanant de la relation médecin-patient n’est plus verticale mais horizontale.

L’intégration de l’Intelligence Artificielle dans la médecine place entre les mains des professionnels de santé et des patients de nouveaux outils d’interaction, d’information, de soins et d’intervention. Le développement de ces nouvelles technologies intelligentes pousse les professionnels de santé et les patients à découvrir une nouvelle façon d’interagir les uns avec les autres.

Du côté du patient :

  • l’automédication permise grâce aux applications ou chatbot d’auto-diagnostic,
  • l’accès en masse aux informations médicales publiées sur les réseaux sociaux, les blogs ou les sites spécialisés grand public,
  • la gestion autonome de leurs maladies chroniques grâce aux applications de suivi…

et du côté du soignant l’utilisation :

  • d’applications de gestion des dossiers,
  • de logiciels de planification des rendez-vous et des salles d’opération,
  • d’outils d’aide au diagnostic,
  • des robots autonomes ou semi-autonomes…

sont autant de solutions qui peuvent distancier le patient de son médecin et nous pourrions faire le constat suivant : même si la relation médecin-patient est à la base des soins médicaux, la communication en face à face laisse doucement place à la communication en ligne et le contact humain à la machine.

Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que l’IA est une technologie qui permet d’ouvrir le champ des possibilités dans l’exercice de la médecine et non de se substituer à la relation thérapeutique entre le médecin et son patient. Le dialogue ouvert entre le patient et le professionnel de santé reste un maillon essentiel du parcours de soins.

La relation humaine entre le professionnel de santé et son patient ne doit pas changer, ce lien doit perdurer. C’est le système d’analyse, de présentation et de pratique des soins qui change. L’IA permet ainsi au professionnel de santé de se concentrer sur sa pratique et sur sa relation avec son patient. Et permet au patient de bénéficier d’une médecine de précision avec un contrôle élevé du risque.

En conclusion

Les avancées technologiques bousculent la pratique traditionnelle de la médecine : réalité augmentée, chirurgie assistée par robot, impression 3D… Toutefois, avec l’intelligence artificielle, c’est aujourd’hui une nouvelle façon de penser et d’exercer qui se met en place.

Au-delà de l’intégration des nouvelles technologies, le professionnel de santé doit s’adapter aux nouvelles exigences des patients et de la société. Selon l’INSEE, 93 % des ménages français ont accès à internet et selon We are Social, 80% de la population utilise les réseaux sociaux. Ainsi, le temps moyen passé en ligne par jour est de 5h34, dont 2h19 sur mobile. Le patient a donc accès à une importante quantité d’informations dans un délai ultra court. Il est à la recherche de rapidité, mais aussi de facilité et de simplicité, et ce, à tout instant et en tout lieu. L’accessibilité à l’information est permanente. Par conséquent, les patients s’attendent à ce que les professionnels de santé soient aussi réactifs et précis dans leurs analyses et leurs échanges. Selon l’Institut Français de l’Expérience Patient, les demandes et les attentes des patients sont plus affirmées et souhaitent être considérés comme des personnes à part entière avec leurs préoccupations, leurs attentes et leurs histoires de vie.

Selon le Conseil national de l‘Ordre des médecins, le patient attend de la médecine qu’elle soit « personnalisée, préventive, prédictive et participative, c’est-à-dire une médecine de précision, adaptée à chaque individu, à toutes les étapes de son parcours de santé, du dépistage et de la prévention au traitement et à l’éducation thérapeutique ». L’intégration de l’IA permet au professionnel de santé de répondre à l’ensemble de ces attentes en optimisant sa gestion quotidienne ainsi que sa pratique de la médecine, faisant de lui un expert d’une médecine augmentée.